Cantique pour un saint

Pauvre insensé, tu l'as voulu, voleur de cieux !

Toi, faible cœur, que le plus léger heurt assomme,

Tu as mêlé ton sang au Sang du Fils de l'Homme !

Croyais-tu que manger un Dieu ne fait  pas Dieu ?

 

Marsyas écorché des forêts de la Grâce,

L'âpre joie m'a saisi la chair, me voici nu,

Sanglant de tout mon corps au tourment inconnu

De m'enfanter un Dieu que sa tendresse écrase.

 

O terre déchirée où le soc grince et geint,

Terre mordue de blés aux racines poignantes,

Ma sœur ! Un autre Germe en moi croît et m'étreint.

 

L'insatiable amour me ronge comme un feu...

Me voici nu, les pieds percés, les mains saignantes,

de mille plaies ouvert aux souffrances d'un Dieu.