La mort

Adieu, mes bien-aimés, où je vais vous ne pouvez me suivre.

C'en est fini des beaux jours de la terre. Ne pleurez pas trop pourtant.

Que serait la vie sans la mort ? Et le calice sinon pour être bu ?

Ma vie est faite et je la vois à côté de moi comme mon œuvre,

Comme une hostie à prendre dans mes mains pour l'offrir comme elle est ronde et pleine, et rien n'y faut, ni joie ni douleur.

J'ai vécu ma vie d'homme, il est temps que je boive ma mort.

 

O Pères, autour de nous toujours vivant, morts toujours présents dans notre âme,

Morts invoqués devant la table et le soir à l'âtre.

Comme autrefois on préparait le repas aux mânes.

Nous avons fait place parmi nous, votre prière est à chaque rite de notre vie.

Morts, nous avons insufflé votre esprit dans nos enfants, nous leur avons donné votre âme,

Nous avons voulu qu'ils soient ce que vous fûtes, ils ont prolongé le sillon.

La terre est à eux, ils la cultivent. On vient d'engranger la moisson. L'usine marche...

 

Et quand la peine est trop dure, O morts ! nous savons où vous joindre.

Un moment vous-même dans notre bouche et votre corps dans notre corps.

L'âme n'est pas si disjointe au corps que nous ne vous possédions tout entiers, l'absence s'est muée en Présence.

O Présence vraiment réelle où tout ce qui nous manque est retrouvé !