L'Inde et le communisme

La plus stupide querelle de notre temps

Ne comptons pas sur l'armée indienne, bien que l'Union y engloutisse cinquante pour cent de son revenu. Dépense folle pour ce malheureux pays. Elle n'est pas entreprise pour le prémunir contre une invasion. Dehli n'a pas ce réalisme. Non, on s'arme contre l'autre héritier de l'empire victorien, on s'arme contre le jumeau du Pakistan.

Ne retraçons pas cette histoire. Elle commence par les massacres de la « partition ». Entre la misère et le sang versé, le subcontinent a payé bien cher sa liberté ! Elle se poursuit par le conflit du Cachemire, où l'Inde, enfant premier-né de l'anticolonialisme des Nations Unies, a fait fi insolemment de leurs conseils, de leurs objurgations, voire de leurs jugements. Cela commence comme un conte de fée : « Régnait au Cachemire un méchant roi détesté de ses sujets... ». Ce roi était hindou. Soixante-dix pour cent de ses sujets étaient musulmans. Ils ont voulu le chasser. Sans les attendre, le roi partit vers la Nouvelle-Dehli avec quarante-huit camions chargés de ses richesses et des richesses des temples, appeler l'Inde à son secours.

L'Inde prit parti pour lui, aussi mauvaise que fût sa cause. Et ne vit-on pas ce paradoxe d'une guerre entre deux dominions aux armées également commandées par des généraux anglais ? Finalement l'ONU obtint un « cessez-le-feu » (son seul succès en cette affaire). Le principe d'un plébiscite fut adopté, mais l'Inde – sûre de le perdre s'il est libre – veut qu'il ait lieu sous le contrôle de son armée.

Entre temps, chacun des partenaires, Inde et Pakistan, a constitué un gouvernement fantoche dans la partie du Cachemire qu'il occupe. Malheureusement voilà que se prennent au sérieux ces gouvernements fantoches, et qu'ils cherchent l'un et l'autre à se rendre indépendants de leurs promoteurs respectifs... et pour y parvenir, tout naturellement ils se tournent vers l'URSS et la Chine communiste.

Ainsi la stupide querelle du Cachemire risque de porter l'URSS jusque sur le subcontinent. En même temps elle entretient l'anarchie au point même où, depuis Alexandre le Grand, sont passées toutes les invasions. L'Histoire nous rapporte des exemples d'aveuglement ; rarement de cette qualité.

Sans doute les autres points de la frontière septentrionale sont-ils moins vulnérables ; plus qu'on ne croit pourtant. Ni au Sikkin, ni au Népal, ces minuscules États tampons, l'Inde n'a su reprendre la politique adroite des Anglais. Peut-être cette incapacité était-elle imposée par la logique de sa libération. Le Népal vient d'être le théâtre d'une agitation que USA, Grande-Bretagne et France ont contribué à apaiser. Le feu ne couve-t-il plus sous la cendre ? Ce n'est pas sûr, et le danger est grand, car l'Himalaya n'est pas la barrière qu'on croit. Déjà en 1792 une invasion chinoise l'a franchi. Surtout l'obstacle n'est pas constitué par les hautes montagnes (des cols les interrompent) mais par la malaria qui sévit sur ses pentes. Désormais une armée peut se prémunir contre ce péril.

Enfin la frontière orientale n'est couverte que par la Birmanie en triple révolution, et dont la Chine revendique la partie nord...